Phytochimie et extraction du romarin

Le romarin est une plante intense qui ne laisse pas indifférent. Un soupçon dans le plat suffit pour ajouter son arôme. Son goût rappelle les conifères mais avec une saveur un peu plus camphrée.

C’est un arbuste vivace mais seulement en zone de rusticité 7. Donc au Québec, il faut généralement le rentrer à l’intérieur pendant l’hiver, sinon il ne survivra pas. Cependant, dans les régions où les températures sont moins froides, on peut le conserver au jardin avec une bonne protection hivernale. Il aime particulièrement le soleil et la chaleur, il ne faut pas trop l’arroser. Chez moi, il pousse bien dans une terre sablonneuse qui ne retient pas l’humidité. La culture en pot lui convient très bien.

Découvrez votre zone de rusticité ici (les références sont différentes selon le pays).

Le nom latin du romarin a été changé en 2017 pour Salvia rosmarinus mais on utilise encore le nom Rosmarinus officinalis. Romarin viendrait des mots «ros» pour rosée et «marinus» pour marin (bord de la mer). Son nom fait donc référence aux abords de la mer Méditérannée.

Phytochimie du romarin

Variabilité de la composition

Comme pour toutes les plantes, il y a des variations dans la composition du romarin en fonction de l’endroit où il pousse. Un plant de romarin qui pousse sur le bord de la Méditerranée présentera quelques différences au niveau de sa composition biochimique par rapport à celui qui pousse dans votre jardin. Les minéraux, les oligo-éléments et les autres composantes auront des proportions différentes. On s’en aperçoit lorsqu’on analyse l’huile essentielle en laboratoire, les molécules sont différentes entre les récoltes. C’est de cette façon que l’on détermine les chémotypes.

Chémotype (ou chimiotype): terme utilisé en aromathérapie pour distinguer les différents groupes d’individus d’une même espèce végétale. Ils ont une apparence physique similaire mais une composition biochimique différente.

Est-ce que le fait que la plante n’ait pas toujours la même composition change les utilisations médicinales?

Si on utilise l’huile essentielle, oui absolument. Parce que l’huile essentielle est un extrait beaucoup plus concentré, les variations de composition ont alors un plus grand impact.

Le romarin contient à peu près 2,5 % d’huile essentielle. Certains principes actifs sont donc 40 fois plus concentrés dans l’huile essentielle que dans la plante entière.

En ce qui concerne les autres types de préparations mentionnées ci-dessous, les résultats varient certainement en fonction de la provenance de la plante. Un plant ayant poussé dans des conditions climatiques très chaudes et ensoleillées, sera définitivement plus résineux. Étant donné que sa résine est riche en monoterpènes volatils et en diterpènes, les propriétés médicinales associées à ces composés seront donc plus prononcées.

Composition phytochimique du romarin

Ce sont les feuilles qui nous intéressent au niveau du romarin, les petites feuilles fines comme des aiguilles. Comme elles développent leurs qualités avec le soleil, elles seront encore plus gorgées de résine en plein été. C’est alors là qu’il est à son meilleur pour la récolte. Mais si c’est pour un usage immédiat, on en récolte une branche au besoin.

Voici quelques principes actifs particulièrement intéressants qui composent le romarin:

Molécules-clés	Famille phytochimique	Quelques propriétés médicinales
Fer, calcium, manganèse, magnésium, cuivre, zinc	Minéraux	Équilibre minéral
Vitamine C	Acides organiques	Soutient l’immunité
Folates (vitamine B9) Pyridoxine (vitamine B6)	Dérivés d’acides aminés	Favorise l’équilibre nerveux et hormonal
bêta-carotènes (provitamine A)	Caroténoïdes	Santé des yeux
Acide rosmarinique	Phénylpropanoïdes	Anti-inflammatoire, antiallergique, stimule le foie, antiviral
Diosmine, lutéoline	Flavonoïdes	Tonique veineux, anti-inflammatoire
Camphre, 1,8-cinéole, alpha-pinène, bornéol, acétate de bornyle, camphène, verbénone	Monoterpènes volatiles	Expectorant, diminue le mucus, antibactérien, antifongique, analgésique
Carnosol, acide carnosique	Diterpènes	Amers pour le foie et la digestion, protection des huiles

Vitamines et minéraux du romarin

Le romarin contient plusieurs minéraux et oligo-éléments mais les portions consommées sont trop petites pour que l’apport nutritionnel soit significatif. C’est la même chose pour la vitamine C , les vitamines B et la provitamine A.

Par contre, leur présence n’est pas à négliger. De toutes petites quantités d’oligo-éléments et de vitamines sont nécessaires pour activer les processus enzymatiques dans notre corps.

Acide rosmarinique

Il y a de nombreuses études cliniques qui ont étudiées ce principe actif. On lui a trouvé des actions protectrices sur les tissus du foie, des reins, des poumons et du cerveau. Et il continue d’être évalué en prévention des cancers de ces organes et de la maladie d’Alzheimer.

Il stimule la production de bile par le foie et a un effet bénéfique sur le taux de triglycérides sanguins. C’est un antibactérien et antiviral contre le virus de l’herpès. Et en inhibant la synthèse des leucotriènes et prostaglandines, des agents pro-inflammatoires, il a un effet antiallergique surtout au niveau des poumons. Donc utile pour l’asthme et les rhinites allergiques causées par le pollen.

Diosmine

Huile essentielle du romarin

Le romarin est une plante très riche en huile essentielle parmi toutes les plantes médicinales. On le sent et on le goûte! Tel que mentionné ci-haut, il existe plusieurs chémotypes. Voici les plus fréquents.

Évidemment, il y a d’autres molécules dans l’huile essentielle qui viennent compléter les propriétés médicinales du romarin.

Si on veut utiliser l’huile essentielle pour se soigner, il faudra s’informer davantage sur les usages appropriés des différents chémotypes.

Diterpènes du romarin

L’acide carnosique et le carnosol ont des structures molécules très semblables. Ce sont des grosses molécules qui se trouvent dans la résine mais elles ne sont pas volatiles. On ne les retrouve pas dans l’huile essentielle extraite à la vapeur car elles sont très difficiles à extraire dans l’eau. Par contre, on va les retrouver dans les extraits au CO₂ supercritique de romarin.

Ce sont des composés amers (voir l’article sur les substances amères bénéfiques pour le foie) et des super antioxydants pour les lipides.

Dans l’industrie, on prépare un «extrait de romarin» qui se trouve à être un extrait enrichi en acide carnosique et en carnosol. C’est un additif pour améliorer la durée de conservation des huiles. On peut l’utiliser autant dans le domaine alimentaire que cosmétique. En plus de diminuer la vitesse de rancissement du produit, il ajoute une protection contre les radicaux libres à nos propres cellules. Personnellement, j’en ajoute à mes huiles de macération de plantes médicinales. Il contribue ainsi à protéger ma peau des effets du soleil en bloquant une partie des UVs.

Extractions des principes actifs du romarin

Feuilles de romarin en cuisine

Les feuilles sont rarement consommées seules, elles sont surtout utilisées dans les marinades et les sauces. Le romarin se combine bien avec les viandes rouges et les saveurs méditéranéennes.

On l’ajoute en début de cuisson pour qu’il reste en contact longtemps avec le liquide et la chaleur. Le romarin sera mieux extrait s’il y a un corps gras (huile végétale, beurre) dans la recette. Sa présence peut aider à réduire la production de composés néfastes qui sont produits lors de la cuisson des aliments. Et, il favorise la digestion des aliments riches en gras.

Extraction du romarin dans l’eau

L’eau n’est pas le meilleur solvant pour extraire les principes actifs se trouvant dans la résine du romarin. Mais l’infusion est tout de même intéressante au niveau médicinal. D’ailleurs, on recommande les infusions au romarin pour les cures automnales du foie et des reins.

Si on procède avec les feuilles fraîches, on les hache le plus finement possible. On prend alors entre 10 et 15 ml de feuilles hachées par 250 ml. Tandis que si on utilise les feuilles séchées, on en prend un peu moins, 5 à 10 ml (1 à 2 g) serait suffisant. On laisse infuser au moins 10 minutes en couvrant la tasse pour ne pas perdre les huiles essentielles.

Molécules-clés	Extraction	Quelques propriétés médicinales
Fer, calcium, manganèse, magnésium, cuivre, zinc	Excellente	Équilibre minéral
Vitamine C	Excellente	Soutient l’immunité
Folates (vitamine B9) Pyridoxine (vitamine B6)	Excellente	Favorise l’équilibre nerveux et hormonal
bêta-carotènes (provitamine A)	Nulle	Santé des yeux
Acide rosmarinique	Bonne	Anti-inflammatoire, antiallergique, stimule le foie, antiviral
Diosmine, lutéoline	Excellente	Tonique veineux, anti-inflammatoire
Camphre, 1,8-cinéole, alpha-pinène, bornéol, acétate de bornyle, camphène, verbénone	Réduite	Expectorant, diminue le mucus, antibactérien, antifongique, analgésique
Carnosol, acide carnosique	Nulle	Amers pour le foie et la digestion, protection des huiles

Avec l’infusion on aura donc un effet plus ciblé sur la circulation veineuse, l’effet anti-inflammatoire et antiallergique ainsi qu’une action stimulante sur le foie.

Extraction du romarin dans l’alcool

Le romarin peut s’extraire dans l’alcool 40% (vodka ou gin) pour obtenir une préparation plus riche en huiles essentielles que l’eau. Et, si on veut extraire encore mieux la résine, on choisira un alcool à 70% ou plus.

Molécules-clés	Extraction	Quelques propriétés médicinales
Fer, calcium, manganèse, magnésium, cuivre, zinc	Réduite	Équilibre minéral
Vitamine C	Réduite	Soutient l’immunité
Folates (vitamine B9) Pyridoxine (vitamine B6)	Nulle	Favorise l’équilibre nerveux et hormonal
bêta-carotènes (provitamine A)	Bonne	Santé des yeux
Acide rosmarinique	Excellente	Anti-inflammatoire, antiallergique, stimule le foie, antiviral
Diosmine, lutéoline	Bonne	Tonique veineux, anti-inflammatoire
Camphre, 1,8-cinéole, alpha-pinène, bornéol, acétate de bornyle, camphène, verbénone	Excellente	Expectorant, diminue le mucus, antibactérien, antifongique, analgésique
Carnosol, acide carnosique	Bonne	Amers pour le foie et la digestion, protection des huiles

L’extrait dans l’alcool 70% donne une préparation assez concentrée en résine. Celle-ci contient plusieurs principes actifs pour réguler l’inflammation, les allergies, les problématiques infectieuses et normaliser la digestion en activant le foie.

Extraction du romarin dans l’huile

On peut également utiliser l’huile pour extraire le romarin. L’huile est le plus souvent utilisée sur la peau en friction ou dans une recette d’onguent ou de crème. On pourrait également l’utiliser pour les soins thérapeutiques en interne même si cela n’est pas très fréquent. Cependant, il y a certaines précautions à respecter dans la procédure de préparation des huiles pour éviter les risques avec le botulisme.

Note: le botulisme est une intoxication grave à la toxine produite par la bactérie Clostridium botulinum. L’huile est un milieu propice au développement de la toxine s’il y a présence d’humidité.

Note: j’aborderai les techniques de préparations des plantes dans un thème séparé.

Molécules-clés	Extraction	Quelques propriétés médicinales
Fer, calcium, manganèse, magnésium, cuivre, zinc	Nulle	Équilibre minéral
Vitamine C	Nulle	Soutient l’immunité
Folates (vitamine B9) Pyridoxine (vitamine B6)	Nulle	Favorise l’équilibre nerveux et hormonal
bêta-carotènes (provitamine A)	Excellente	Santé des yeux
Acide rosmarinique	Réduite	Anti-inflammatoire, antiallergique, stimule le foie, antiviral
Diosmine, lutéoline	Nulle	Tonique veineux, anti-inflammatoire
Camphre, 1,8-cinéole, alpha-pinène, bornéol, acétate de bornyle, camphène, verbénone	Excellente	Expectorant, diminue le mucus, antibactérien, antifongique, analgésique
Carnosol, acide carnosique	Excellente	Amers pour le foie et la digestion, protection des huiles

L’extrait dans l’huile permet d’aller chercher plusieurs composés agissant au niveau du système respiratoire, du système digestif et pour les soins de la peau.

Précautions d’usage du romarin

Si vous avez des conditions de santé particulières, vous devez en parler avec un professionnel de la santé avant de consommer le romarin à des fins thérapeutiques.

Il y a quelques rares cas d’allergie au romarin. Sinon, la plupart des précautions s’adresse à l’utilisation de l’huile essentielle qui est plus concentrée que les extraits présentés dans cet article.

Références:

BRUNETON, Jean. Pharmacognosie, Phytochimie, Plantes médicinales, 4^e édition, Éditions Tec & Doc, Paris, 2009, 1269p.

Gazmend Skenderi, «Herbal Vade Mecum», Herbaxy Press, New Jersey, 2003, 480p.

Robert Tisserand, Rodney Young, «Essential Oil Safety», Churchill Livingstone, Elsevier, 2nd, 2014, 780p.

BEGUM, Asia et coll. «An in-depth review on the medicinal flora Rosmarinus Officinalis (Lamiaceae)», Acta Sci. Pol., Technol. Aliment, 12(1) 2013, p.61-73.