Capter l’arôme du lilas

Fleurs de lilas rose

Chaque année, quand le lilas fleurit, c’est tout un monde de souvenirs, de douceur et de beauté qui flotte dans l’air. Son parfum est unique, presque magique. On a envie de le garder, de le mettre en pot, d’en faire un produit odorant et goûteux. Mais bien souvent, le résultat n’est pas à la hauteur de ce qu’on aurait voulu. Alors comment capter l’arôme du lilas ?

Que se passe-t-il avec l’arôme du lilas ?

Parce que les molécules responsables de l’odeur du lilas sont très instables. Dès que la fleur est cueillie, une partie de ses composés s’évapore ou se transforme. Et si on la chauffe, on détruit une bonne partie de ce qui fait son charme.

Variétés de lilas à fleurs blanches (S. vulgaris var. variginata)

Dans les fleurs du lilas blanc, on retrouve surtout du lilac aldéhyde, un aldéhyde monoterpénique très volatil. Il donne cet parfum intense et légèrement sucré. Mais il n’est vraiment pas facile à extraire ni à stabiliser. La chaleur, l’oxygène et même la lumière peuvent le détruire.

Lilac aldéhyde

Très sensible à l’oxydation, à la lumière et à la chaleur. Très peu soluble dans l’eau. Plutôt soluble dans l’alcool et dans l’huile.

Ensuite, le deuxième composé le plus abondant est le lilac alcool, un alcool monoterpénique très instable lui aussi.

Lilac alcool

Très sensible à l’oxydation, à la lumière et à la chaleur. Un peu soluble dans l’eau. Plutôt soluble dans l’alcool et dans l’huile.

D’autres composés comme le benzaldéhyde, le phénylacétaldéhyde et le 1,8-cinéole sont les autres composés les plus représentés qui contribuent aussi à l’arôme du lilas blanc.

Variétés de lilas à fleurs violettes (S. vulgaris var. variginata)

Le lilas violet à un profil différent, d’ailleurs on peut facilement le sentir en passant près de l’arbre. Ici, c’est le benzaldéhyde qui domine, suivi du phénylacétaldéhyde. Le lilac alcool et lilac aldéhyde sont encore présents mais en moindre proportion que dans le lilas blanc. Son parfum est plus doux avec une petite touche d’amande, vous ne trouvez pas ?

Molécule de Benzaldehyde

Benzaldéhyde

Il a une arôme d’amande et de cerise. Assez stable à l’oxydation. Légèrement soluble dans l’eau. Mieux solubilisé dans l’alcool et l’huile.

Molécule de phénylacétaldéhyde

Phénylacétaldéhyde

Composé très fréquent dans les aliments et les fleurs. Son arôme est sucrée et herbacée. Très peu soluble dans l’eau. Mieux solubilisé dans l’alcool et l’huile.

Le lilas violet contient des molécules plus stables qui résistent mieux à l’oxygène, à la chaleur et au temps. On pourrait croire qu’il est donc plus facile d’en tirer un extrait qui « sent bon le lilas ».

Mais voilà, ces molécules ne suffisent pas à recréer le parfum du lilas. Elles donnent une note douce, légèrement amandée et sucrée, mais pas l’odeur typique de la fleur fraîche. Et dès qu’on chauffe ou qu’on dilue dans l’alcool, le parfum devient fade, voire non reconnaissable

Pourquoi trouve-t-on des huiles essentielles de lilas ?

Il arrive qu’on voit des « huiles essentielles de lilas » vendues en ligne ou dans certaines boutiques. Le nom fait rêver… mais en réalité, le lilas ne donne pas d’huile essentielle par distillation. Ses fleurs contiennent très peu de molécules volatiles, et la plupart des molécules sont trop fragiles pour survivre à la distillation.

Alors, que contiennent ces flacons ?
Ce sont généralement des reconstitutions aromatiques, c’est-à-dire des mélanges de molécules synthétiques ou naturelles isolées (comme le linalol, le benzaldéhyde, le méthyl eugénol, etc.). On devrait plutôt les appeler « fragrance de lilas » ou « huile parfumée au lilas » car ce ne sont pas des huiles essentielles.

Cela ne veut pas dire que ces produits sont mauvais, mais ils ne contiennent pas les molécules de la fleur entière, et ne sont pas adaptés à l’usage médicinal ou culinaire. Et si je me fie aux commentaires des consommateurs qui ont expérimenté ces produits, l’odeur est très puissante et parfois très différente du vrai lilas.

Capter l’odeur du lilas

Si les fragrances de lilas du commerce ne te conviennent pas, je te propose de tenter cette expérience à la maison. Avec beaucoup de minutie et de patience, tu peux réussir à préparer un produit vraiment exceptionnel. Pour ce faire, on utilisera une méthode très ancienne : l’enfleurage. Elle consiste à capturer lentement les molécules odorantes dans une matière grasse solide, sans chaleur, uniquement par contact.

Technique d'enfleurage du lilas

Voici comment tu peux faire chez toi :

  1. Fais fondre doucement un beurre de coco désodorisé (ou tout autre corps gras solide inodore).
  2. Verse-le dans un plat en verre pour créer une couche mince, puis laisse-le figer à température ambiante.
  3. Cueille des fleurs de lilas bien fraîches, sans rosée ni pluie. Évite les fleurs brunies ou fanées.
  4. Retire chaque fleur une à une des tiges. On ne veut pas des parties vertes.
  5. Dispose les fleurs sur la surface de la graisse solidifiée, face vers le bas si possible.
  6. Couvre le plat pour garder le parfum (papier parchemin non blanchi, tissu, ou couvercle).
  7. Après quelques heures, 24 heures max, retire les fleurs et remplace-les par des fraîches.
  8. Répète cette opération aussi longtemps que tu as accès à des fleurs fraîches (au moins 10 fois).

Capter la saveur du lilas

Si le parfum du lilas est envoûtant, sa saveur est plus subtile. Et si on tente de l’extraire avec des méthodes classiques comme l’infusion à chaud, elle peut être assez désagréable. Pour apprécier ce que le lilas a à offrir en cuisine, il faut y aller à froid et rapidement !

Voici une recette de limonade :

Propriétés médicinales des fleurs de lilas

Légèrement fébrifuge (qui aide à faire baisser la fièvre) : Dans certaines traditions européennes, les infusions de fleurs de lilas étaient utilisées pour faire transpirer légèrement et aider le corps à éliminer la fièvre.

Apaisantes et calmantes : Le parfum du lilas a un effet légèrement sédatif, souvent associé à la détente.

Digestives légères : L’infusion de fleurs fraîches, parfois combinée à d’autres plantes (menthe, mélisse), peut être utilisée pour faciliter la digestion ou soulager les ballonnements.

Autres parties du lilas

Même si les fleurs de lilas sont les plus connues et aimées pour leur parfum, ce ne sont pas elles qui contiennent le plus de principes actifs thérapeutiques.

Les feuilles : utilisées en décoction ou infusion pour leurs propriétés fébrifuges, digestives, amères et antiparasitaires.

L’écorce (notamment des jeunes rameaux ou du tronc) : parfois utilisée comme tonique amer, fébrifuge et antipaludique.

Références

Se Yeon Oh et coll. Rapid determination of floral aroma compounds of lilac blossom by fast gas chromatography combined with surface acoustic wave sensor. Journal of Chromatography. 2007.

One thought on “Capter l’arôme du lilas

  1. Si on fait macérer (à froid) les fleurs de lilas dans une huile, est-ce que les fleurs donnent leur propriété au solvant ? (même si l’odeur n’y est pas) ?

Laisser un commentaire